01/06/2015
Nouveau "Libération" : le naufrage de la presse papier ?
Ce que ça dit de l'époque est symptomatique :
La maquette de Libération était claire, sobre, confortable à lire et mettait le texte en valeur. Ça n'empêchait pas les ventes de s'amenuiser... Les propriétaires du titre ont donc fait ce que font les journaux en détresse : marginaliser le texte, et faire un emballage tapageur. Opération coûteuse (ils se sont même payé l'agence Rampazzo) ; opération généralement sans effet, sinon humilier les rédacteurs et rebuter les lecteurs – comme le montre l'expérience.*
Libération n'est que le plus déclinant des quotidiens parisiens. Sauf exceptions, la presse papier va mal. Les Relay de gare se transforment en marchands de sodas et de barres chocolatées. Pourquoi ? Depuis trente ans, c'était : 1. à cause du prix de vente au numéro des journaux français (sans doute les plus chers du monde) ; 2. à cause de l'uniformisation croissante de leurs contenus. Mais depuis dix ans, c'est à cause de l'internet. Pourquoi payer 2 euros pour acheter les infos de la veille, quant vous avez gratuitement les dépêches du jour (de minute en minute) sur votre téléphone ? Quant aux sites des quotidiens, ils sont payants, c'est un handicap. Et ils n'ajoutent pas grand-chose aux dépêches gratuites fournies par Yahoo ou Google.
Qui achète encore un journal papier ? Des plus de 50 ans, et en nombre décroissant. Ce processus frappe spécialement Libé, journal de bobos, donc « journal de classe » d'une classe qui ne lit plus de journaux. Alors les propriétaires de Libé ont changé l'emballage, pour faire ressembler le journal à un visuel pour ados. Vous en voyez un échantillon ci-dessus : c'est le naufrage de l'information et de l'analyse, pulvérisées en confetti, noyées sous des gadgets qui occupent le champ visuel. Ce choix de présentation exprime un mépris total envers le texte. Dans ces conditions, pourquoi continuer à faire un journal ? Plutôt ouvrir un café tendance... C'était d'ailleurs l'idée des propriétaires il y a un an et demi.
C'est d'autant plus dommage que les rédacteurs de ce journal menacé de liquidation avaient fait, depuis six mois, un effort quant à la qualité des contenus. Mais visiblement les contenus ne comptent plus...
Pour que des journalistes acceptent d'être ainsi traités, il faut que les perspectives d'emploi soient tombées au dessous du niveau de la mer.
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* En 1993, La « nouvelle maquette » du Figaro Magazine commandée par Louis Pauwels à l'agence Maggiori (pour très cher et contre l'avis de Robert Hersant), se solda par la fuite de dizaines de milliers de lecteurs… et l'abandon progressif de la nouvelle maquette.
13:00 Publié dans Médias | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : médias
Commentaires
'LIBÉ'
> Je m'étais amusé un jour à comparer le tirage de 'Libé' avec celui de la presse régionale : à mon souvenir il avoisinait 'l'Est Républicain' (ou 'le Républicain Lorrain' ?). Et avait une bonne dizaine (au moins) de titres devant lui.
Parler de 'Libé' comme de la gazette du Marais me semble aller au delà de la blague de mauvais goût. La plupart de leurs articles en ligne sont suivis d'un chapelet interminable de commentaires qui montrent le parfait décalage entre le contenu du canard et 99% des avis ambiants (même si je sais les commentateurs ne pas être un échantillon probant en la matière).
Je trouve que 'La Croix' tire son épingle du jeu avec des thèmes rafraichissants et un vrai surplomb face à l'actualité que tous les payants affirment avoir mais qu'ils n'ont pas, car de l'analyse excitée et à chaud ne vaut souvent pas plus, in fine, qu'une dépêche AFP. Là ou l'aspect contre-culturel du regard chrétien devient un avantage journalistique...
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Écrit par : perlapin / | 01/06/2015
TOUS
> De fait, la lecture du journal n'est plus perçue par les "fabricants de presse" comme une activité sérieuse visant à s'informer mais comme un loisir ludique. Ils adaptent leur "produit" en conséquence. Tant pis pour le journaliste consciencieux, tant pis pour le lecteur qui recherche un organe de presse digne de ce nom.
Consolation : quand Rampazzo aura coulé tous les titres de presse, il ne lui restera plus qu'à couler lui aussi.
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Écrit par : Bernadette / | 01/06/2015
> Il reste "La Décroissance" ! Abonnons-nous, réabonnons-nous !
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Écrit par : Alex / | 01/06/2015
NOUVELLE FORMULE
> Un magazine que je lisais avec grand plaisir il y a quelques années a connu la même évolution : 'Psychologies'.
Il y a encore 5-6 ans, d'excellents articles de fond (pas tous, mais il y en avait).
Puis est venue une nouvelle formule, avec plus de pub, moins de texte, des articles plus "tendance"...et beaucoup plus superficiels.
En juin : une nouvelle "nouvelle formule". Je ne sais pas ce qu'elle vaut (je ne l'ai pas encore feuilletée). Mais rien qu'en regardant la couverture, je m'attends au pire :
http://www.psychologies.com
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Écrit par : Feld / | 01/06/2015
PLUS RIEN
> Pour le lecteur de journaux que j'ai toujours été, le prix d'un quotidien (environ 2 €) me semble aujourd'hui prohibitif par rapport au contenu effectif. Et cela, sans même parler de la concurrence d'Internet.
En fait, il n'y a désormais plus RIEN, dans les journaux, et ce n'est pas nécessairement la faute des journalistes, sélectionnés désormais sur leurs "non-qualités", pour se fondre dans la masse. Cela commence dès l'école...
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Écrit par : jem / | 02/06/2015
LES IDÉES
> il faudrait d'abord que Libé se libère !
Quand un journal a prôné le matérialisme pendant tant d'années, il n'y a rien d'étonnant que les idées s'en aillent de ses articles, c'est même logique.
Ces idées étant complètement détachées du réel, comment la rédaction pourrait-elle se rendre compte de ce qui intéresse les gens puisque ce journal ne s'y intéresse pas lui-même ?
un journal qui prône le libéralisme moral part du principe que désirer est LE critère de légitimité, ce qui entraîne l'absence de tout débat intellectuel.
pourquoi encore débattre ? puisque l'envie est là
le relativisme condamne au vide intellectuel aussi efficacement que le sectarisme.
Bien sûr que Libé est relativiste ! un journal qui aujourd'hui s'indigne de la pédophilie alors qu'il publiait des nouvelles pédophiles dans les années 70 et 80 et qui s'en justifie en disant "c'était l'époque, faut comprendre"
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Écrit par : E Levavasseur / | 02/06/2015
FATALEMENT
> Au dela de la dénonciation il faut toujours les mécanismes de ce qu'on dénonce:
Le contenu de nombreux journaux ne peut être que fatalement débile: ils bouclent leurs budgets grâce à la publicité (plus de 30% du CA de la presse française) et par des aides publiques jusqu'à 1/2 euro par exemplaire pour certains titres. Les plus aidés sont 'l'Humanité', 'La Croix' et 'Libération'. Tout cela n'aide pas à penser.
A noter que, pas plus que la presse ne vit de ses lecteurs, les partis politiques et les syndicats ne vivent de leurs cotisants. Subventions et caisses noires sont prédominantes. Cela doit expliquer bien des choses.
Corruption institutionnalisée à la française.
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Écrit par : Pierre Huet / | 02/06/2015
> En parlant journaux, je découvre cet amusant article du 'Monde' qui nous apprend que si les Français ont des difficultés financières, c'est parce qu'ils sont nuls en économie. Mais c'est bien sûr, il suffisait d'y penser !
http://www.lemonde.fr/argent/article/2015/06/03/la-mauvaise-culture-economique-des-francais-participe-a-leur-vulnerabilite-financiere_4645611_1657007.html
Comme ce trait d'humour s'appuie sur une "étude" fomentée par un machin qui s'appelle Audencia Nantes (sic), je tente de m'instruire sur sa nature. Wikipedia m'apprend qu'il s'agit d'une institution hautement scientifique autrefois appelée "Ecole supérieure de commerce de Nantes" et désormais "Audencia Nantes - School of Management", dont la devise est "Inspiring new leaders". C'est fou comme on n'a, au bout du compte, jamais la moindre surprise...
En parlant de noms débiles mais so business, mon collègue de bureau breton m'apprend l'existence de cette "école" :
http://www.brest-bs.com/
Je me demande ce que pense une personne de langue maternelle anglaise à qui on dit fièrement qu'on sort de la "Breast Business School".
Enfin, heureusement qu'il reste les cerveaux de la City et de Wall Street pour empêcher que la mauvaise culture économique des Français ne plonge la planète dans le chaos financier...
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Écrit par : Christian Vennec / | 04/06/2015
Christian Vennec :
> "Je me demande ce que pense une personne de langue maternelle anglaise à qui on dit fièrement qu'on sort de la "Breast Business School"."
Tant qu'on est dans l'à-peu-près poitrinaire, ils ont bien leur Vallée de la Silicone, non ? ;)
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Écrit par : PMalo / | 05/06/2015
@ Christian Vennec et P Malo
> Aujourd'hui les nouvelles actions d'évangélisation commettent très souvent la lourde erreur de s'identifier à l'hyper classe internationale
car les cathos français disposent de
"la forgive night",
le "flight to life",
le "welcome to paradise"
Les Français (?) peuvent aussi rencontrer leur évêque : meetyourbishop.com
La colonisation n'a cessé de mettre des bâtons dans les roues des missionnaires, pourquoi recommencer cette erreur ??
En totale opposition avec les instructions inchangées de l'Eglise :
"Ne faites aucune tentative, ni ne cherchez aucunement à persuader ces peuples de changer leurs coutumes, leur façon de vivre, leurs usages, quand ils ne sont pas manifestement contraires à la religion et à la morale.
Il n'y a rien de plus absurde que de vouloir apporter en Chine la France, ou l'Espagne, ou l'Italie, ou quelque autre partie de l'Europe.
N'apportez rien de tout cela, mais la foi, une foi qui ne rejette ni n'offense la façon de vivre et les usages d'aucun peuple, quand il ne s'agit pas de choses mauvaises. Au contraire, la foi veut que ces choses soient conservées et protégées"
Pape Alexandre VII,
Instructions à l'usage des Vicaires Apostoliques en partance pour les Royaumes chinois de Tonkin et de Cochinchine
"En incarnant l’Évangile dans la culture autochtone des peuples qu’ils évangélisaient, les saints Cyrille et Méthode eurent le mérite particulier de former et de développer cette même culture ou, plutôt, de nombreuses cultures."
St Jean Paul II, Slavorum apostoli, 1985
https://twitter.com/peleprlaFrance/status/476346066682781696
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Écrit par : E Levavasseur / | 05/06/2015
à E Levavasseur
> ma paroisse a organisé une soirée où plusieurs dizaines de ménages se recevaient mutuellement sans savoir lesquels allaient venir chez eux. Très bonne idée. Mais comment
l'ont-ils appelée : la "Church Party" ! Très mauvais nom.
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Écrit par : emmeline / | 05/06/2015
à EL et Emmeline
> pourquoi toutes ces américaineries ? hélas parce que la catholicité en France est de moins en moins diverse. Dans beaucoup de paroisses il n'y a plus que la bourgeoisie d'affaires, ses jeunes se rêvent à Wall Street. Pas comme ça qu'on évangélisera nos immigrés.
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Écrit par : Guillemot / | 05/06/2015
LOURDE ERREUR
> ah ma pauvre Emmeline !
comme je compatis !
je pourrais aussi vous parler des soirées "cheese and wine" pour les hommes.
le vin et le fromage n'est-ce pas typiquement français ?!
@ Guillemot
c'est tout à fait ça
les immigrés et les classes les plus modestes aussi ! se figure t-on qu'elles s'y reconnaîtront ?
tout cela n'est pas une question de point de vue personnel, c'est UNE LOURDE ERREUR !
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Écrit par : E Levavasseur / | 05/06/2015
@ EL, Emmeline, Guillemot
> En matière d'améric-âneries ,il y a eu aussi le rassemblement de religieux (français) : Brother & Sister Act II.
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Écrit par : Pierre Huet / | 06/06/2015
FRANCE CULTURE
> Et maintenant les papes protestants. Quand l'ignorance, la cuistrerie ignare et la niaiserie geek se mêlent au goût pour le calembour de fin de soirée, on aboutit chez France Culture.
http://www.franceculture.fr/emission-la-grande-table-2eme-partie-maitre-yoda-ou-le-nouvel-esprit-du-protestantisme-2015-04-28
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Écrit par : Christian Vennec / | 08/06/2015
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